Tortue de 120 ans, remarquable
« Plus d'un siècle que je traîne ma carapace ici »
La tortue est née il y a 120 ans. Depuis, Nénette n'a jamais quitté la Butte Sainte-Anne. Voici le récit d'un reptile qui fait l'attraction du quartier depuis des dizaines d'années.
J'ai arrêté de compter. C'est en faisant des calculs que Michèle, ma maîtresse, a déduit mon âge. J'avais à peine 100 ans quand elle a hérité de moi, et ça fait 22 ans que je vis avec elle. Moi, c'est Nénette ! Une jolie petite tortue terrestre. Oh, je n'irai pas jusqu'à dire que je n'ai pas pris une ride, mais je me porte bien : 2,8 kg, une belle carapace ni tout à fait ronde, ni tout à fait carrée, et l'oeil bien vif.
Une femelle, pour sûr
Évidemment, le temps a laissé son empreinte sur mon corps de vieille dame : mes écailles s'écartent un peu et leur couleur ont beaucoup moins d'éclat. Ma peau aussi, a vieilli. Et cette année, à ma sortie d'hibernation, j'ai rencontré le vétérinaire pour la première fois en 120 ans (une occlusion intestinale, pauvre de moi). C'est lui qui a confirmé à Michèle que j'étais bien une dame. En tout cas, je dois bien avouer que les années n'ont pas eu raison de mon appétit. Les fraises : mon péché mignon !
Michèle dit que sous mes airs attendrissants se cache un caractère bien trempé. Mais je suis le reptile de la Butte Sainte-Anne : je mérite bien qu'on cède à quelques caprices. D'abord, je ne mange que ce qu'on me donne à la main. Une fois repue, je pars me promener dans le jardin. Je reconnais que je ne prends pas toujours la peine d'épargner les plantes. Et le visage de Michèle qui se décompose... « Parfois, on dirait vraiment qu'elle fait exprès. Elle marche bien droit sur toute la rangée ! » Et puis il y a la chasse aux orteils. Ils me croient lente, mais je n'ai rien perdu de ma vigueur. Je me hisse sur la pointe des pattes et je cours mordre les doigts de pied. Le nec plus ultra, c'est la grattouille. Michèle a découvert il y a peu, qu'en me grattant la carapace, je ne pouvais m'empêcher de secouer le postérieur de délectation...
Je suis passée de mains en mains depuis plus d'un siècle (sans compter celles de tous ces gamins du quartier qui défilent régulièrement dans mon jardin). À la mort de mon premier propriétaire, c'est sa soeur qui m'a accueillie. Elle vivait juste en face de chez Michèle (je me souviens d'elle petite, elle venait jouer avec moi déjà à l'époque). Au décès de cette voisine, ses enfants n'ont pas souhaité me garder. Ils pensaient me donner au Jardin des plantes. Heureusement que Michèle était là ! On ne m'aurait pas nourrie à la main là-bas !
La vie de château
Au moins ici, je vis comme une reine : je me couche vers 17 h pour me réveiller à 10 h, et je passe mon temps à me prélasser au soleil (ça augmente ma température, sous ma carapace). Chaque année, aux alentours du 20 octobre, j'entre en hibernation. Je m'enterre et j'attends que les saisons passent. Michèle m'a construit un abri qui me tient au chaud. Et je repointe le bout de mon bec le 19 mars. Le même calendrier depuis 120 ans...
Un jour, j'ai entendu Michèle dire : « Bien sûr que je serai triste à sa mort. Vous vous rendez compte ? Ça fait 50 ans que je la connais ! » Moi, je n'ai pas envie de m'en aller...
Source:
http://www.nantes.maville.com/actu/actudet_--Plus-d-un-siecle-que-je-traine-ma-carapace-ici-_loc-1482787_actu.Htm