philippe37
Age : 58 Date de naissance : 26/12/1965 Messages : 143 Date d'inscription : 23/05/2012 Localisation : Touraine
| Sujet: Corse : les tortues marines refont surface Dim 4 Aoû 2013 - 6:28 | |
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- Ces animaux marins pratiquent aussi les grandes migrations estivales qui les amènent àfrôler les rivages insulaires. Le voyage comporte de nombreux risques et périls. Il se déroule toutefois sous surveillance.
D'avril à octobre, les tortues marines changent de ton. Les beaux jours balaient leur tendance à la discrétion et valorisent l'image. Les animaux s'affirment et refont surface le long des côtes de Corse, de Provence, d'Afrique du Nord, d'Espagne ou bien de Grèce. Entre ciel et mer Méditerranée, les tortues, bercées par les eaux tièdes, sortent volontiers la tête de l'eau lors des périples au long cours. « Les individus parcourent l'ensemble de la Méditerranée. D'importants mouvements migratoires sont avérés à travers le bassin durant l'été », notent les scientifiques.
Le processus coïncide avec des stratégies balnéaires et une occupation accrue de l'espace maritime. L'action humaine prend de l'ampleur. Par ricochet, le scénario de la circumnavigation comportera plus d'incertitudes que d'ordinaire. Il n'empêche, quelle que soit la saison, les voyageuses progressent toujours en état de faiblesse. Toutes les espèces sont classées menacées, et vulnérables à travers le monde. Car la mer est semée d'embûches jusqu'à rejoindre le camp des sites « défavorables et inadéquats » selon la formule administrative.
Et la menace de l'accident pèse lourd sur les carapaces. Le mécanisme renvoie à la cohabitation avec les travailleurs de la mer. « Les captures accidentelles en lien avec la pêche constituent le principal péril pour les tortues », constatent les membres du Groupe tortues marines France - GTMF. Ce sont les filets longs de plusieurs kilomètres et hauts de plusieurs mètres parfois, qui figurent l'obstacle funeste sur le trajet. L'installation vise les thons et les espadons. Les tortues s'empêtrent, à leur tour, dans ses mailles. Elles paieront encore un lourd tribut aux cordages et autres bouées. La situation suscite une vive inquiétude au sein du GTMF.
Dégradation de l'habitat
La préoccupation est partagée par les pêcheurs. Responsables mais pas coupables. « Des programmes de recherches sont en cours afin de réduire la fréquence des captures ainsi que leur impact. Des pêcheurs professionnels se sont engagés dans la démarche aux côtés des acteurs de la conservation », note-t-on au GTMF. L'instance va dans le même sens et joue le rôle d'une puissance fédératrice à travers son groupe de réflexion, « capture accidentelles ». De ce point de vue, l'intérêt est de « coordonner les efforts » accomplis comme les pistes d'avenir suggérées. Au-delà de la pêche, d'autres engrenages sont à l'œuvre sur les flots. La pollution par exemple. À ce stade, c'est le sac plastique jeté depuis le pont du navire, par exemple, qui aura un effet meurtrier, tandis que le reptile pêche par gourmandise. Car rien ne ressemble davantage à une savoureuse méduse ou à un délicieux encornet qu'un morceau de plastique entre deux eaux. La tortue fera la confusion. Elle paiera d'une occlusion intestinale puis de sa vie son avidité et son manque de discernement. Les maladies, les collisions avec les navires génèrent leur lot de victimes. Les scientifiques et les protecteurs des tortues redoutent encore les conséquences du braconnage sur les tortues mais aussi sur leurs œufs.
La pratique que la justice et la morale réprouvent s'épanouit aussi bien en mer que sur la grève. Elle consiste pour l'essentiel à prélever des œufs et de nouveaux nés qui seront ensuite élevés en captivité. À ce jour, les autorités compétentes telles que, Affaires maritimes, Office nationale de la chasse et de la faune sauvage maintiennent la garde et « mettent tout en œuvre pour résoudre le problème du braconnage », indique-t-on au sein du GTMF. Dans le même temps, l'environnement se durcit pour les tortues. Le phénomène correspond à une dégradation de l'habitat sur le littoral et en mer. Dans ce registre, les scientifiques invoquent le recul des herbiers, l'usage des ancres comme les opérations de dragage. Les animaux pâtissent des diverses pollutions marines et vivent mal le réchauffement climatique. La hausse des températures conduira à une élévation du niveau de la mer et à une érosion des plages où les reptiles ont coutume de pondre leur nid.
Mobilisation législative internationale
Mais il y a pire, de l'avis des observateurs, que la disparition de quelques nurseries. La douceur ambiance risque de rompre les équilibres de genre en provoquant une surreprésentation des femelles. Le sexe des tortues dépend de la température de l'eau. Et lorsque celle-ci dépasse les 29°, ce sont des tortues femelles qui sortiront de l'œuf. Pour donner des mâles, les embryons doivent bénéficier d'un peu plus de fraîcheur. Sur la grève, le territoire de l'animal régresse à mesure que le littoral s'urbanise et s'industrialise. La circulation des véhicules en bord de mer est un facteur aggravant de plus.
La lumière émise dans la nuit par les riverains représente une nuisance majeure, en particulier au moment de la ponte et de l'éclosion des œufs. Plus rien ne tourne rond chez les pondeuses et chez les jeunes. Les faisceaux éblouissent et rendent la lecture du paysage impossible. Les tortues désorientées se détourneront de la mer d'où vient le salut. Lampadaires et autres torches fonctionnent, en outre, comme un signal pour des crabes, des oiseaux, quelques renards en quête de nourriture, des rongeurs en maraude. Leur champ de vision s'éclaircit. La couvée, d'entrée de jeu, ne survivra pas à leur féroce appétit. D'autant plus que les ponctions sont sévères y compris les nuits sans lune et sans le moindre rai de lumière. Les prédateurs ont l'habitude de piocher dans le tas et de se mettre sous la dent les 9/10eme des bébés au moment clé où ils s'apprêtent à se jeter dans la vague. Les tortues viennent au monde dans l'effroi selon le principe du sauve-qui-peut.
Dans cette configuration, elles ne devront qu'à la chance et à leur rapidité d'avoir l'avenir devant elles. À travers la Méditerranée occidentale, le péril est toutefois moins gênant qu'ailleurs. La raison est simple : les tortues, en majorité, trouvent qu'il y a mieux que les côtes françaises, italiennes, espagnoles pour y déposer ses œufs. La Grèce, le Liban, la Libye et la Turquie sont préférables.
La législation, à son tour, est porteuse de prospérité et de bien-être, à coup de conventions, d'accords internationaux et de directives. Le long des golfes insulaires, les conventions de Washington, de Berne, de Bonn ou de Rio ont instauré un ordre plus responsable. À l'échelon insulaire, une dimension universitaire se superpose au dispositif. On opte pour la recherche et pour la connaissance approfondie. On se veut vigilant. La tortue marine fait alliance avec la plateforme Stella Mare. Au début de l'année 2013 elle trouve sa place au cœur d'un atelier, « les tortues marines en Corse ». La cause de l'animal est chère au cœur des différentes composantes de la société. La réflexion sera le fruit de la mobilisation du Groupe tortues marines de France, du réseau tortues marines de Méditerranée française, de l'université de Corse, de l'Ifremer, de la Stareso, de l'Office de l'environnement de Corse. Dans la liste des partenaires figurent aussi comité régional des pêches maritimes et des élevages marins de Corse, le conservatoire du Littoral, les Réserves naturelles des Bouches de Bonifacio et de Scandola ainsi que les directions départementales des territoires et de la mer. La méthode pour aller de l'avant est celle du diagnostic puis de l'engagement. Autour de la table on fait le point sur « les données disponibles », et on parle synergies possibles. Les participants sont en quête de collaborations en vue d'élever le niveau de connaissance et de « développer le réseau actuel d'intervention en Corse ».
La caouanne et les posidonies
L'ignorance est toujours désignée comme l'ennemi. L'approche insulaire s'inscrit en cohérence avec « les programmes de surveillance et de conservation en cours ou en préparation à l'échelle du bassin méditerranéen et de l'Europe. »La question de la tortue marine n'est pas nouvelle. Elle devient de plus en plus sensible à mesure que le temps passe. D'ores et déjà, l'effort de protection accompli prend la forme d'un « Réseau tortues marines en Méditerranée » dans le prolongement du GTMF. Les animaux évoluent dans un espace de liberté surveillée par quelques dizaines de bénévoles. Le rôle des guetteurs revient à repérer, à signaler et à identifier les individus.
Face à un animal mort, l'approche se construit selon le même mode. Des prélèvements viendront compléter l'ensemble. « Une observation, même isolée présente toujours un intérêt », indique-t-on. Selon les circonstances, les observateurs deviendront sauveteurs. « Il arrive de tomber sur un animal blessé ou malade, échoué sur une plage », admet-on.
La priorité cette fois sera de ramener le patient au Centre d'étude et de soins pour les tortues marines en Méditerranée française (CESTMed), au Grau du Roi. Au-delà, les informations recueillies serviront de socle à la rédaction de notes de synthèse concernant les espèces présentes en Méditerranée, leur taille moyenne, leur comportement et leurs petites préférences géographiques.
La tortue marine évolue sous le coup de la diversité. Ainsi, c'est la caouanne ou Caretta caretta qui s'est positionnée en Méditerranée. « Elle est l'espèce la plus fréquente dans les eaux françaises de Méditerranée. Elle renvoie à 75 % des recensements et à 90 % des individus identifiés. Les signes de sa présence s'assimilent selon les scientifiques à quelques coups d'éclat. Deux pontes découvertes en 2002, en Corse à proximité de Porto-Vecchio dans le secteur de Palombaggia, une autre dans le Var sur la plage de Saint-Tropez, en 2006 seront qualifiés « d'événements remarquables ».
La caouanne apprécie, en particulier, dans le grand herbier de posidonies le long de la plaine orientale, du côté des îles Cerbicales ou des Bouches de Bonifacio et des îles des Moines. La tortue verte fait quelques incursions sur ce territoire maritime. Mais l'animal se plaît davantage plus au Sud et plus à l'Est. « Elle est relativement fréquente en Méditerranée orientale. C'est d'ailleurs dans ce périmètre qu'elle se reproduit », commentent les scientifiques. L'espèce est considérée comme « rare » dans la portion occidentale. À juste titre. « Six observations ont été signalées le long des côtes de Méditerranée française ». Il arrive aussi que la tortue caret, la tortue de Kemp- la plus petite de la famille 75 cm de longueur de carapace pour un poids de 50kg ou la tortue luth- la plus grande 2 m de long et jusqu'à 1 000 kg - croisent dans les parages. Le détroit de Gibraltar est leur porte d'entrée vers la Méditerranée, le plus souvent.
À chaque espèce ses petites gourmandises. Ainsi, la caouanne adopte volontiers un régime carnivore à base de poissons, de crabes, de mollusques. Elle ne rechigne pas à s'enfiler quelques éponges ou bien une algue. La méduse fait partie du menu. Pour la luth, elle constituera le met principal qu'on va chercher jusqu'à 900 mètres de fond. Quand on aime, on ne compte pas. La tortue s'accommodera aussi de quelques poissons, crustacés, mollusques, et échinodermes. Autant de proies qui forment l'ordinaire des tortues quelles que soit leurs caractéristiques.
Baguées et équipées de balises. Les allers et venues des tortues polarisent les attentions des scientifiques. Dans le cadre du Plan national d'action en faveur des tortues marines, entre autres, certains individus ont fait l'objet d'une identification et d'un suivi. Ainsi, des caouannes capturées, soignées puis remises à l'eau depuis le littoral français ont été repérées en Espagne, en Italie et en Tunisie. Une autre caouanne a fait le trajet jusqu'en Italie depuis le Texas où elle avait été baguée. À son tour, une luth de Trinidad est venue s'échouer en Turquie après avoir traversé l'Atlantique et la Méditerranée.
Dans les années 1920, la caouanne se faisait plus présente sur les rivages corses. Elles y pondaient aussi ses œufs à une fréquence bien plus soutenue. Comme ses congénères, elle avait coutume de laisser sur le sable des traces larges de 70 à 80 cm, comparables à celle d'un engin à chenilles. Les promeneurs, les baigneurs et autres usagers qui relèvent de telles marques sur la plage doivent avertir le Réseau Tortues marines de Méditerranée française : tortues.med@free.fr Toutes les collaborations sont précieuses.
Les habitudes territoriales des tortues pondeuses n'ont rien de figé. Les recherches récentes font apparaître qu'une tortue revient pondre sur la même plage tout au long d'une saison donnée. En revanche, autre saison et autre site. Les tortues sont au mieux de leur forme reproductrice autour de 15 ans. Source : Corse Matin | |
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